A L’OPERA NATIONAL DU RHIN : REHABILITATION D’HAMLET
Nouvelle production
Mise en scène, Vincent Boussard
Reprise par Anneleen Jacobs
Décors, Vincent Lemaire
Costumes, Katia Duflot
Maquillage et coiffures, Catherine Nicolas
Lumières, Guido Levi
Hamlet, Stéphane Degout
Ophélie, Ana Camelia Stefanescu
Gertrude, Marie-Ange Todorovitch
Claudius, Nicolas Cavallier
Laërte, Christophe Berry
Spectre, Vincent Pavesi
Marcellus, Mark Van Arsdale
Horatio, Jean-Gabriel Saint-Martin
Polonius ; Dimitri Pkhaladze
Deux Fossoyeurs, Yuriy Tsiple et John Pumphrey
Chœurs de l’Opéra national du Rhin
Direction, Michel Capperon
Orchestre symphonique de Mulhouse
Direction musicale, Patrick Fournillier
Hamlet d’Ambroise Thomas est la dernière des grandes productions de la saison à l’Opéra National du Rhin dont les premières représentations en ont été données à Mulhouse au début du mois. Cet opéra a longtemps souffert d’un certain mépris face aux chef-d’œuvres shakespeariens de Verdi. Aussi est-il heureux comme l’écrit Gérard Condé dans un article du programme : « Hamlet a retrouvé depuis vingt ans, tant en France qu’à l’étranger un statut en accord avec les mérites réels d’un ouvrage que l’oubli s’apprêtait à recouvrir ».
Dans cette coproduction avec l’Opéra de Marseille, l’action se joue dans un décor unique conçu par Vincent Lemaire : deux grands murs, ceux d’une salle de réception qui changent d’apparence selon les scènes grâce à de subtils éclairages. Dans cet espace oppressant Vincent Boussard réalise une mise en scène très expressive remarquablement efficace. La violence intérieure s’y extériorise comme par exemple dans la dure confrontation du troisième acte entre Gertrude et Hamlet, celui-ci au comble de la fureur arrachant la robe de sa mère. Au deuxième acte, le metteur en scène supprime les comédiens -pas de théâtre dans le théâtre- mais Hamlet fait jouer les rôles de Gonzague et de sa femme par le Roi et la Reine. La scène y gagne en intensité dramatique. Et les idées originales ne manquent pas, telles ce spectre qui descend le long du mur (doublé par un acrobate) ou la baignoire où Ophélie va se noyer, scène nimbée d’une extrême poésie. Sur le plan musical, la satisfaction est toute aussi grande. Patrick Fourniller à la tête de l’excellent Orchestre Symphonique de Mulhouse dirige avec subtilité la partition raffinée d’Ambroise Thomas que certains reprochent d’être « trop française » mais c’est précisément cela qui en fait le charme et l’intérêt. Pas de faille dans la distribution retenue par l’OnR mais on se doit de citer en tête de celle-ci l’Hamlet halluciné de Stéphane Degout et l’émouvante Gertrude de Marie-Ange Todorovitch. Tous deux allient une présence scénique remarquable à une prestation vocale exceptionnelle. Nicolas Cavallier prête sa belle voix de basse si expressive au roi Claudius et Ana Camélia Stefanescu dans la scène très attendue de la folie d’Ophélie irise son chant de mille facettes passant d’un charme retenu à l’émotion la plus intense.
Cette excellente production de l’OnR permet de découvrir ou redécouvrir un ouvrage qui, bien que non exempt de quelques faiblesses, reste un des plus intéressants du répertoire français du XIXème siècle.
Pierre Iung
Prochaines représentations à l’Opéra de Strasbourg
19, 21, 23, 26 et 28 juin.
Crédit Photo : OnR/Alain Kaiser